Citroën C3 ( 5HP ) – cul de poule 1922
Historique
La Citroën Type C, plus connue sous l’appellation « Citroën 5 HP » ou « Citroën 5 CV », fut le second modèle d’automobile conçu et commercialisé par André Citroën, entre 1922 et 1926. Elle arriva après la 10 HP « Type A » (1919), puis la 10 HP « B2 » (1921) : elles furent les premières voitures européennes fabriquées en grande série.
L’une des premières couleurs proposées était le jaune pâle « pamplemousse », qui lui valut son premier surnom de « Petite Citron ». Elle fut également surnommée « Cul de Poule » à cause de son arrière en « pointe de course », puis « Trèfle » dans sa version Torpédo à trois places disposées en trèfle. Le succès de cette carrosserie vaudra d’ailleurs à tous les modèles de 5 HP l’application impropre du surnom de « Trèfle »
La genèse de la Type C se situe dans l’immédiat après-guerre, alors que l’Europe entière se trouvait dans un état désastreux, notamment sur le plan économique, où une inflation implacable réduisait la valeur de l’épargne et des investissements de toute nature.
Seuls les industriels ayant une approche moderne de la production pouvaient espérer traverser la crise financière avec un minimum de dommages.
En Europe, l’un d’entre eux est André Citroën, fervent admirateur des méthodes de fabrication en série d’Henry Ford, surtout après sa visite à Détroit en 1912. Il avait pu mettre ces méthodes en pratique pendant la guerre dans son usine de fabrication de munitions, où il avait obtenu des niveaux de production remarquables (50 000 obus par jour).
À la fin de la guerre, Citroën avait une usine entièrement équipée, qu’il résolut d’utiliser pour la production de masse de véhicules, comme Henry Ford l’avait fait avec son célèbre modèle T depuis 1908.
Alors que le gouvernement français encourageait, par des avantages fiscaux, les constructeurs automobiles à investir dans les Cyclecars, (poids maximum : 350 kg), Citroën préféra faire son entrée dans le segment des petites voitures, alors monopolisé par Peugeot et Renault.
Développement :
En dépit de sa ressemblance avec le Type A dessiné par Jules Salomon, la 5HP était surtout l’œuvre de l’ingénieur Edmond Moyet qui, comme Jules Salomon, arriva au quai de Javel en provenance du « Zèbre », après une expérience dans le domaine des voitures populaires ; quelques mois plus tôt, il avait dessiné un véhicule très similaire : l’Amilcar CC.
Le résultat de ce projet fut présenté pour la première fois au Salon de l’Auto en novembre 1921 sous le nom de Type C, sachant que les commandes et les premières livraisons de la voiture ne furent reçues qu’au printemps 1922.
Le Type C était une petite voiture proposée uniquement avec une carrosserie Torpédo à deux places, d’une longueur de seulement 3,2 mètres et avec un empattement de 2,25 mètres (châssis court).
La ligne était élégante, malgré la petite taille de la carrosserie. L’avant présentait une très belle calandre en forme de coupe-vent et la partie arrière de la carrosserie était « de type sport avec pointe de course allongée et pontée.
Diffusion :
La 5 HP était une voiture populaire, destinée à pénétrer le segment de marché inférieur à celui de la 10 HP Type A. Elle était « livrée complète, sans supplément, avec démarrage et éclairage électrique, cinq roues garnies de pneus et pont arrière muni d’un différentiel».
Le prix de vente de la 5 HP Torpédo en 1922 8 500 FR représentait environ 60 % de celui de la 10 HP B2 (13 900 FR) et était également très inférieur à celui de sa principale concurrente, la Peugeot Quadrilette (10 000 FR) qui n’était qu’un cyclecar.
Bien qu’ingénieur de formation, André Citroën était surtout un génie des affaires a la recherche d’idées nouvelles à assimiler et à exploiter . C’est ainsi qu’il avait fondé une société de crédit à la consommation, permettant aux clients d’acheter ses voitures à crédit, une méthode nouvelle pour l’époque. De même, Citroën diffusait des tarifs détaillés des réparations et inventa le système d’échange-standard de pièces mécaniques remises à neuf à l’usine.
André Citroën faisait preuve d’un impressionnant sens de la publicité ; une facette de son génie fut de promouvoir cette voiture vers un public féminin, ce qui était absolument inhabituel à l’époque. Tous les documents publicitaires de la 5 HP représentaient en effet la voiture conduite par une jeune femme.
Après un démarrage lent en 1922, le succès de la 5 HP fut tel qu’à partir de 1924, elle représentait la moitié des ventes de Citroën (près de 30 000 véhicules) et devint la première automobile populaire européenne.
Louis Renault (1877-1944) aurait décrit la 5 HP comme «la voiture qui l’avait empêché de s’endormir».
Pierre Dumont dans Quai de Javel, Quai André Citroën,(1976) écrivit : « La 5 CV Citroën roulait à 60 km/h, une vitesse qu’elle semblait pouvoir tenir indéfiniment, et elle était d’une robustesse incroyable. Elle remporta un grand succès, tant à cause de ses qualités, de son élégance, surtout en cabriolet que de son prix ».
L’appellation commerciale : « 5 HP » devint « 5 CV » en fin 1925, à l’occasion du changement du mode de calcul de la puissance des moteurs (passage de Horse-Power à Chevaux-Vapeur).
Entre 1919 et 1925, Citroën installa un réseau de cinq mille agents dans le monde entier, et des filiales et concessionnaires exclusifs furent implantés un peu partout : Japon, Pays-Bas, Suisse, Danemark, Afrique du Nord, Australie, Amérique du Sud, etc. Des unités de production furent installées en Espagne, Italie, Pologne, Algérie, Belgique et Angleterre à partir de 1925, afin d’échapper aux barrières douanières qui imposaient des taxes élevées pour les produits d’importation dans certains pays (ex. : droits Mac Kenna en Grande-Bretagne).
Les premières voitures de série furent construites en mars 1922, en version Torpédo 2 places, puis début 1923, une version Cabriolet 2 places plus luxueuse suivit. Fin 1923 furent ajoutés une version torpédo 3 places et une fourgonnette.
Succès populaire :
La 5 HP était un modèle de fiabilité et de frugalité par rapport à la concurrence : elle était extrêmement robuste comme en témoigne « Bubsy », une Torpédo 2 places achetée d’occasion par deux étudiants, qui en 1925 effectuèrent à son bord, dans des conditions extrêmes et sans aucun problème mécanique, un périple de 17 000 km en cinq mois autour de l’Australie.
Malheureusement, bien que la 5 HP ait été un succès indéniable, elle était insuffisamment rentable. Un modèle « Type C4 », à carrosserie « tout acier » fut envisagé mais finalement abandonné à cause d’un prix de revient beaucoup trop élevé. Afin de préparer la naissance de la B14 « tout acier », André Citroën prit seul la décision, contre l’avis général, de mettre fin à sa production en .
La 5 HP est aujourd’hui la voiture de collection type des années 1920. Son succès tient à ce qu’elle a déjà été à son époque une immense réussite commerciale et aussi au fait qu’il est possible de la restaurer très facilement à partir de pièces d’époque encore nombreuses et de refabrications. Sur les 81 000 5 HP construites, beaucoup ont été transformées en véhicules utilitaires, tracteurs, etc. Il était estimé qu’environ deux à trois mille voitures (3 à 4 %) ont survécu.
Structure :
La petite Citroën avait de l’avance sur la concurrence : elle était équipée d’un démarreur et de phares électriques, atouts majeurs pour satisfaire la clientèle féminine sensible à la facilité de conduite.
Elle était légère : le poids à vide était de 543 kg (essentiellement celui du moteur, de la boîte de vitesses et du pont arrière. La vitesse maximale était de 60 km/h, la consommation d’essence de 5 L aux 100 km.
Les châssis 5 HP étaient assemblés dans l’usine de Levallois et le montage final était fait à Javel. Des versions avec conduite à droite étaient disponibles pour la France (la demande était encore forte pour ce mode de conduite) et aussi pour l’exportation (Angleterre, Commonwealth, Suède, Argentine, Australie).
Carrosserie :
La carrosserie était constituée d’une structure en bois, sur laquelle étaient clouées les tôles de carrosserie. La 5 HP fut la dernière Citroën avec carrosserie à ossature composite (ossature en bois recouverte de tôle).
La seule porte, côté passager, s’ouvrait vers l’avant. Les charnières étaient invisibles (sauf cabriolet) et les déformations de la caisse étaient absorbées par une serrure à double cône évitant l’ouverture inopinée de la porte.
Les voitures de début 1922 possédaient un capot à trois fentes d’aération, remplacé vers septembre 1922 par une version à seize fentes, et l’avant présentait une élégante calandre en forme de coupe-vent.
Fin 1922, pour des raisons techniques de fabrication, le radiateur, jusqu’alors à faisceau soudé dans la calandre, fut construit avec faisceau et calandre nickelée séparés. Les premiers écussons Citroën étaient à chevrons bleus sur une base nickelée, puis les motifs furent inversés.
Moteur :
Le moteur à soupapes latérales était un 4-cylindres de 856 cm3 refroidi par thermosiphon développant une puissance de 11 ch. À partir du , le système de refroidissement fut amélioré par le montage d’un ventilateur sur tous les modèles (auparavant monté uniquement sur les cabriolets).
L’alimentation était assurée par un carburateur Solex .
L’allumage, initialement par batterie, bobine et delco, fut remplacé pour son manque de fiabilité après seulement 6 mois par un allumage par magnéto.
Commandes et transmission :
Le moteur était accouplé à une boîte de vitesses à trois rapports non synchronisés et marche arrière. Les pignons étant à taille droite, la boîte avait tendance à « chanter » en 1re et 2e, mais était silencieuse en 3e (prise directe). La boîte était encore plus bruyante si les pignons présentaient de l’usure, mais aussi quand le palier entre arbre primaire et secondaire avait trop de jeu, ou si les pignons se trouvaient excentrés.
Comme sur les voitures de l’époque, la pédale d’accélérateur était située au milieu, entre celle d’embrayage à gauche et celle du frein de ralentissement situé en sortie de boîte de vitesses à droite.
Il n’y avait pas de freins sur les roues avant : le levier de frein à main commandait les deux tambours des roues arrière. Le freinage n’était pas le point fort de la voiture : il fallait savoir anticiper et doser l’action des deux systèmes de freinage, sous peine de casser un arbre de roue. Beaucoup de 5 HP furent modifiées pour coupler le frein de transmission et les freins arrière sur la commande au pied.
Châssis et suspension :
Le châssis en échelle était de forme trapézoïdale. Il était renforcé par des traverses pour éviter la déformation des longerons en « U ».
La suspension consistait en quatre ressorts à lames quart elliptiques inversés. Des amortisseurs à friction étaient montés d’usine à l’arrière sur le cabriolet (plus lourd) à partir de 1925.
En automne 1923, le châssis court Type C2 fut allongé de 10 cm en Type C3 (l’empattement passe à 2,35 m) et prolongé par un col de cygne fermé par une traverse supplémentaire dépassant le pont arrière. Il soutenait l’arrière de la caisse jusqu’alors en porte-à-faux. Sur ce châssis « long » furent construites les carrosseries Torpédo et Cabriolet, les nouvelles Torpédos « trois places » et la Voiture de Livraison. L’allongement du châssis se remarquait par la distance supérieure entre la roue de secours et l’aile arrière. Ce châssis fut construit sans modification jusqu’à la fin de la production.
Équipements :
Le pont arrière était du type « banjo ». Le carter de différentiel eut une forme ronde, puis ovale depuis juillet 1925. La denture du couple conique était du type Citroën « à chevrons ». Une denture hélicoïdale plus facile à usiner et plus robuste devint disponible, en deuxième monte, à partir de 1928.
Le système de pare-brise de Duvivier fut remplacé par un système similaire Citroën sur les modèles TL et T3-2 en juillet 1925.
Les pneus à talons « Michelin câblé » de 700 x 80 étaient du type « haute pression », c’est-à-dire gonflés à 4 à 5 bars, rendant la conduite délicate et le confort médiocre. Ils furent remplacés à partir de mars 1924 par des pneus à talons 715 x 115 « basse pression » gonflés à 2,5 bars, proposés d’abord en option, puis montés en série en juin. Par la suite, les jantes 11-12 x 45 à tringle apparurent en 1927 pour les pneus à tringles à très basse pression (1,5 à 1,75 bar) « Confort Bibendum » et furent couramment montées en remplacement des montes d’origine à talons, sur forte incitation de Michelin.
Le niveau d’équipement de la 5 HP étant relativement simplifié, de nombreux accessoiristes et manufacturiers en profitent pour proposer de multiples solutions d’amélioration du confort de conduite ou de performances, telles que : porte-bagages, jauge à essence (O.S.), thermomètre d’eau (Boyer-Meter), compteur de vitesse et montre (Jaeger, O.S.), amortisseurs (Houdaille, Repusseau), freins avant (Poulet, Acmos), améliorations du moteur (Super-Culasse Desprez, Transformations F. Crespelle, Culasse Ruby-Ricardo).
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